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politiful people
3 décembre 2005

Lettres de mon chateau : 16 - à l'attention de Nicolas Sarkozy

Pour une présentation générale des lettres de mon chateau, écrites par Mazarin, aka Sarkozy 

16 – A l’attention de Nicolas Sarkozy

Monsieur l’ancien Ministre et cher Nicolas,

Après bien des hésitations je me suis résolu à t'écrire. Je t'en voulais tellement que je n'arrivais pas à prendre la plume. Je n'avais rien envie de te dire, sinon de mauvaises choses, ou même des injures. Je t'en voulais tellement que j'aurais même pu t'étrangler de mes propres mains. Je t'avoue que, tous les soirs, je me postais devant la télévision pour assister à ce spectacle si réjouissant des « Guignols de l'info ». C'est ainsi que durant des semaines j'ai pu passer mes nerfs. Dieu que cela m'a fait du bien de voir ma marionnette exécuter la tienne. Je ne me lassais pas de ce spectacle. J'aurais voulu t'en faire bien davantage encore. C'est vrai que les autres m'avaient lâché, mais ça m'était bien égal. Pasqua, je le connais depuis si longtemps, je suis habitué à ses trahisons. Avec lui, je ne fais même plus la différence entre ses fidélités et ses traîtrises, les deux se confondent dans un ballet dont je ne suis pas certain qu'il ait lui-même les clés. Que Juppé ait eu des états d'âme, peu m'importe aussi. Je n'ai jamais eu avec lui les sentiments d'affection que je t'ai portés. Il s'en est suffisamment plaint pour que je te l'avoue aujourd'hui. Que Philippe Séguin me fasse crise sur crise, boude le congrès du RPR, passe aussi. Je me suis toujours méfié de lui. Il le sait. Il me le rend. Il n'y a rien là de très surprenant. Mais que toi, tu me laisses, là c'est trop ! C'est toi que j'avais chargé de conduire ma campagne présidentielle, c'est toi qui devais être mon porte-parole. Toi que j'avais promis au plus bel avenir. Toi à qui j'avais donné mon affection. Toi sur qui je comptais plus que sur aucun autre. C'est pour cela que j'ai eu du mal à t'écrire à te reparler, à de nouveau communiquer avec toi.

Je ne résiste pas au plaisir de souligner ta qualité d'ancien ministre. Ce Balladur t'a tourné la tête pour un vague maroquin. Sais-tu au moins ce que tu aurais eu avec moi ? Imagines-tu ce que tu as perdu. Tu aurais pu être Premier ministre. Voilà la vérité cruelle qui est la mienne aujourd'hui. Je veux que tu saches que je t'écris de mon bureau présidentiel, un endroit que tu ne connais pas encore. Peut-être y viendras-tu un jour ? Figure-toi que je t'imaginais au jour de la passation de pouvoirs avec François Mitterrand. Tu étais seul chez toi devant ton poste de télévision et tu enrageais en voyant les images me montrant en train d'arriver à l'Elysée, seul, sans toi. Tu étais furieux contre la terre entière de t'être trompé à ce point. J'espère qu'à ce moment précis tu en as voulu à Balladur de t'avoir entraîné là où tu es maintenant. D'ailleurs, il fallait voir la tête de Balladur. J'ai la cassette, une merveille de vérité. Et quand les militants de notre mouvement t'ont sifflé à Bagatelle, toi qui étais il y a peu de temps encore leur chouchou, n'as-tu pas ressenti une immense impression de gâchis ? Et tout cela à cause d'Edouard.

Je me demande encore ce que tu as pu lui trouver pour te faire abuser à ce point. Il est ton exact contraire. Il n'y avait rien de commun entre vous deux. Et, de surcroît, il était déjà empêtré avec Pasqua. Pasqua que tu détestes et qui te le rend bien. Oui, je n'ai toujours pas compris la dose d'aveuglement, de bêtise et d'entêtement qu'il t'a fallu pour te tromper à ce point. Et, de surcroît, contre toute évidence, alors que j'avais gagné, tu t'entêtais et tu t'enferrais davantage encore. Ce n'était plus une noyade, tu étais devenu un naufrage à toi seul. Crois-tu que cela soit pour moi un plaisir que d'avoir dû m'entourer des seuls fidèles qui me restaient. Oui, je sais, je t'entends déjà persifler sur Pons, sur Debré, sur Baroin. Je connais leurs limites. Je les éprouve chaque jour davantage mais au moins me sont-ils restés fidèles en toute circonstance. Que puis-je désormais fonder sur toi si tu demeures si profondément inconstant dans tes sentiments ? Oui, je t'en ai voulu et je t'en veux encore.

Mais ce n'est rien à côté de la haine que tu suscites chez mes proches amis qui étaient pourtant tiens hier encore. J'ai dû me cacher pour t'écrire. Ils voulaient que tu sois battu à Neuilly C'est pour cela qu'ils ont mis une liste contre toi. J'ai réprouvé cette attitude mais je les ai laissé faire. Après tout, tu l'avais bien mérité. Il fallait bien que l'on te punisse pour cette félonie. Tous les jours, j'ai un rapport de Debré qui me décrit tes faits et gestes. Il me conjure de t'empêcher de redevenir député Car tu veux le redevenir. Et on me dit que, de surcroit, tu veux le faire le même jour que Balladur. Quand cesseras-tu donc ce manège ridicule ? Je te demande de le laisser tomber comme tu l'as fait pour moi il y a deux ans. Si tu ne lui parles plus, si tu ne le rencontres plus, si tu ne le vois plus, alors peut-être que certaines choses redeviendront possibles entre nous. Oh ! ne te fais aucune illusion, tu ne retrouveras jamais la place qui fut la tienne auprès de moi ! Tu as fait trop de mal pour que l'on te pardonne ainsi. Ce serait tout de même trop facile. Et que dire de l'insulte que cela représenterait pour ceux qui sont mes proches aujourd'hui. Déjà, quand Juppé t'a invité à déjeuner, ils en étaient malades. Alors si c'était moi, imagine un peu le charivari que cela provoquerait. Je ne veux même pas y penser. D'ailleurs j'ai pris mes précautions Avec toi, il vaut mieux. Mais quand tu auras lu ma lettre, elle se détruira instantanément. C'est Pilhan qui m'a mis en garde. Il est persuadé que tu l'aurais montrée aux journalistes pour te mettre en avant à mes dépens,

Eh oui! voilà mon cher Nicolas ce que tu as gagné à ton attitude de ces derniers mois ! D'ailleurs mets-toi bien dans la tête que j'ai changé. Désormais, je ne pardonne plus. En tout cas plus tout de suite. Avant d'envisager ton retour il faudra que tu souffres encore Je veux que tu voies ce que cela fait d'être seul, abandonné de tous comme je l'ai été moi-même. Toi qui as si souvent fait le malin à la télévision, à mes dépens, je veux que tu en sois privé pendant de longs mois. Et puisque tu as aimé Balladur à ma place, tu n'as qu'à te contenter de lui maintenant. Petit-déjeune, déjeune, dîne avec Iui chaque jour. Au Trocadéro, à Chamonix, à Deauville. Tu verras comme c'est plaisant, drôle, sympathique. Ce n'est qu'après que tu auras surmonté tout cela que, peut-être, je t'accorderai mon pardon. Je dis « mon » pardon, car, pour ce qui est des autres, je crains pour toi qu'il ne vienne jamais. Mes amis ne t'ont jamais aimé, me diras-tu. Eh bien, ils t'aiment encore moins aujourd'hui. Tu t'étais imaginé que c'était facile de devenir un homme d'État. Eh bien, tu t'es trompé et maintenant il faut payer.

Note bien que ça ne me fait pas plaisir de te dire tout cela. Si tu savais comme la vie est triste à l'Élysée. Tu ne peux imaginer combien je me sens seul. Parfois, je me prends à imaginer que tu ne m'as pas trahi et que de nouveau tout est possible comme avant. Je ris même en te voyant traiter Romani d'imbécile, en faisant envoyer Juppé, comme tu adorais le faire, en te moquant des conseils silencieux d'Ulrich, en te bagarrant avec Séguin. Car vois-tu j'aimais chez toi ce goût du combat, de la politique et de l'impertinence. Ah ! grand Dieu ! pourquoi m'as-tu trahi ? J'aimerais que tu redeviennes le Nicolas que j'ai connu et que j'ai aimé. Celui à qui je pouvais téléphoner à tout bout de champ. Celui à qui je pouvais tout dire. Mais je ne t'ai pas oublié. Ah! si seulement tu pouvais commencer à dire du mal d'Edouard ! Tout serait plus facile et surtout plus rapide. Il faudrait que tu sois avec lui aussi cruel et méchant que tu le fus avec moi en son temps. On pourrait même imaginer que tu dises qu'il t'a menacé pour d'obliger à le soutenir, ou bien qu'il t'avait hypnotisé. Juste histoire de dégager ta responsabilité et de montrer que tu n'étais pas dans ton état normal lors de la campagne pour l'élection présidentielle. Vois-tu, mon rêve serait que toute la famille gaulliste se retrouve. Tu reprendrais ta place parmi nous, celle que tu n'aurais jamais dû quitter. Quant à Balladur, nous le laisserions tout seul croupir dans son coin. A son âge, ce n'est pas grave. D'ailleurs, il n'a jamais été vraiment l'un des nôtres. Crois-moi, ce ne serait pas une perte. D'ailleurs, tu peux lui dire de ma part que je veux jamais plus le revoir, que tout est fini. Il m'avait promis de ne pas être candidat, il a failli à sa promesse. Cela je ne peux l'accepter. Tu sais bien le prix que j'attache aux engagements, surtout lorsqu'ils sont personnels. Comment d'ailleurs a-t-il même pu avoir la volonté d'être candidat ? Je le connais, c'est un velléitaire. Je me demande si ce n'est pas toi qui lui a mis cette idée en tête. Tu pensais que ce serait ton intérêt. Et voilà, ça t'est retombé sur la tête. Il y a au moins une morale à toute cette histoire et je suis bien content qu'elle l'ait été à tes dépens !

Voila, mon cher Nicolas, ce que j'avais sur le cœur. Ça m'a soulagé de te le dire aussi librement. A toi de réfléchir maintenant et de me dire ce que tu entends faire. Crois en mes sentiments toujours courroucés et cependant indulgents. 

Jacques Chirac

 

Réponse de Nicolas Sarkozy à Jacques Chirac 

Monsieur le Président de la République,

Je vous remercie pour ce courrier qui m'a touché et qui ne m'a pas laissé insensible. J'ai été heureux que vous rompiez enfin ce silence qui s'était installé entre nous depuis si longtemps. Si vous saviez à votre tour combien j'ai souffert d'être devenu le paria de notre famille et combien votre indifférence marquée à mon endroit m'avait blessé. Je n'arrivais pas à m'y faire. Vous savez que je suis beaucoup plus sensible qu'on ne le dit. Durant ces longues semaines, je n'ai eu pour parler que Balladur et Léotard. C'est dire que ce ne fut pas drôle tous les jours. Si étonnant que cela puisse paraître, je n'ai jamais cessé d'être chiraquien. Je l'ai été en suivant scrupuleusement votre exemple. Car enfin, il y a quelque injustice à me reprocher de vous avoir trahi. Vous étiez bien membre de la famille gaulliste quand vous avez trahi Jacques Chaban-Delmas pour Valéry Giscard d'Estaing. Et quand il a fallu trahir Giscard, avez-vous hésité à le faire alors même qu'il avait fait de vous son Premier ministre ? Je suis le seul à avoir suivi aussi scrupuleusement votre exemple. Va-t-on m'en vouloir de cela ?

Quant à Balladur, c'est un comble ! Ce n'est tout de même pas moi qui l'ai trouvé. Ensuite, il a fallu choisir quand vous vous êtes séparés. J'ai choisi. Mal, il est vrai. Mais j’étais son ministre et je pensais qu’il pouvait gagner. Vais-je payer toute ma vie pour une simple erreur de pronostic ?

Quant à mon retour auprès de vous, je ne suis pas dupe. L’affection n’y tient qu’une petite place. Vous savez mieux que moi juger les hommes et vous n’imaginez pas une seconde de continuer avec un tel gouvernement. Vous me demandez de quitter Balladur, mais c’est déjà fait. Il est devenu tellement insupportable depuis qu’il a perdu que plus personne ne le supporte. Alors, pensez donc, je n’ai pas l’esprit de sacrifice poussé à ce point. Quant à dire du mal de lui, pas question. Non que je ne le pense pas, mais je ne veux pas être pris à nouveau comme cible par les « Guignols ». Une série, oui, deux, c’est beaucoup trop. Alors, peut-être, pourrais-je recommencer à vos côtés comme simple conseiller. Au bout de quelques heures, une fois, mes preuves faites à nouveau, seriez-vous heureux d’avoir avec moi un homme de confiance et de fidélité qui puisse fournir une heureuse alternative aux différends médiocres et sempiternels qui opposent Juppé à Séguin.

Votre collaborateur, qui n’a jamais cessé d’être fidèle et dévoué.

Nicolas Sarkozy

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Commentaires
C
Une série de visuels, campagne d’incitation au Vote sont disponibles sur <br /> http://citoyena.zeblog.com/ <br /> Ils sont libres de droits pour un usage sur Internet ou pour des impressions sur papier … (dans le cadre des élections présidentielles 2007).<br /> N’hésitez pas à les télécharger et à les diffuser … <br /> <br /> Cordialement<br /> Citoyen
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